Écriture : Mettre ses tripes dans ses mots, ou comment écrire quelque chose de satisfaisant

Crédits photo : Leah Newhouse – Pexels

Dans un monde où l’écriture créative se répand de plus en plus – mais où malheureusement la liberté d’expression n’est pas encore universelle – beaucoup d’entre nous se sont lancé·e·s dans l’aventure. Pouvoir écrire nos nouvelles, romans, essais, textes courts, pamphlets, poèmes, articles scientifiques, articles de blog, entrées de journal, posts Twitter, posts Instagram, j’en passe et des meilleures, est grisant pour certain·e·s, usant pour d’autres.

Dans cette masse de texte à la qualité variable, avec la révolution de l’Intelligence Artificielle et des ghostwriters où il est désormais possible de créer du contenu sans lever le petit doigt, nous sommes de plus en plus à être insatisfaits, voire à dénigrer ou haïr le produit de nos efforts.

Comment faire pour enfin écrire des textes qui vous conviennent ?
 

C’est un problème qui touche beaucoup d’écrivain·e·s, poètes, bloggeurices, et plus généralement les artistes et celleux qui « créent du contenu » (je ne suis pas un fan de l’étiquette créateur de contenu parce que ça ne veut rien dire selon moi bref).

Attention, je ne veux pas dire que nous artistes sommes tous dans cette vision, certain·e·s sont très satisfait·e·s de leur art et je ne peux vous dire que bravo ! 🙏

Pourquoi est-ce que je fais est nul/détestable/à chier/pas terrible (rayer mention inutile) ?

Pourquoi est-ce que je ne suis pas capable de produire quelque chose qui me plaît ?

Oui parce qu’il y a deux dimensions : celle de produire un écrit qui plaît aux autres, et celle d’en faire un qui plaira à nous. Bien souvent, les deux ne s’accordent pas forcément.

Sans avoir la prétention de trouver le remède miracle pour vous rendre satisfait·e·s de vos textes comme beaucoup de solutions miracles se vendent, je vais essayer de vous faire poser quelques bonnes questions.

Plus que : ah ce choix de mot ne me convient pas, ah j’aime pas le rythme de ce paragraphe ou encore ah, je ne suis pas fan de cette tournure de phrase, qui sont des mesures locales et curatives, je pense qu’il vaut mieux remonter aux origines de cet écrit. Qu’est-ce qui fait que vous êtes insatisfait·e·s en général ?

  • Tout d’abord, quels sont vos objectifs d’écriture ? Est-ce que vous écrivez pour être connu·e·s, pour vous amuser ou parce que vous avez ce besoin maladif, presque thérapeutique d’écrire ?

Sachez le distinguer. Ce que vous faites pour attirer l’attention des autres ne veut pas forcément dire que vous faites quelque chose de bon pour vous. Peut-être que vous n’êtes pas tout à fait sincère dans votre écrit. Peut-être qu’en ce faisant, vous sortez de votre zone de confort, de ce qui est acceptable pour vous d’écrire ou de produire.

Et là en soit, c’est déjà un problème. Parce que vous n’êtes pas en train de vous écouter, et que la première défense que vous avez est : « j’aime pas ça », ‘c’est mauvais » et j’en passe… Attention, sachez également différencier le « moi » du « les autres ». « Personne ne va lire ça », typiquement. Premièrement, c’est faux, il y a un public pour tout. Deuxièmement, parce que vous faites passer votre public avant votre personne. Or, c’est vous qui écrivez. Plaisez-vous vous-même, ensuite les autres viendront. Celleux qui vous suivront pour votre personnalité. Celleux qui vous apprécieront pour votre honnêteté. C’est une qualité qui se perd trop souvent.

Pour citer mon expérience personnelle, j’ai d’abord écrit le roman qui allait devenir Lames et Sanglots sous un autre titre, sous une tout autre catégorie, sous une tout autre narration parce que je voulais d’abord me faire la main. Ce projet devait être un projet de départ, le premier que je finirais et que je ferais publier. Le Serment du Traître, ou par la suite Ombre et Sang étaient deux versions d’un roman steampunk jeune adulte qui n’avait pour but que de me rendre publié, riche et célèbre. (Je vous rassure, maintenant je ne suis aucun des trois).

Mais en finissant d’écrire le premier jet d’Ombre et Sang, quelque chose manquait. J’étais fier d’avoir fini mon premier premier jet, premier d’une longue série, mais j’étais resté sur ma faim. Cette histoire n’était pas celle que je voulais raconter. Cette histoire n’avait pas la richesse que je voulais lui donner. Alors j’ai pris une pause. Et je me suis posé d’autres questions. 

  • Ensuite vient la seconde question : quel est votre style, quelle est votre approche ? Et par cette question, je veux dire : quelles sont vos références ?

C’est une question aussi importante que la première. Peut-être écrivez-vous sur un style dont vous vous êtes inspiré·e·s, et pas forcément sur un style que vous aimez. Ce qui arrive particulièrement souvent quand vous écrivez pour attirer l’attention plus que vous n’écrivez pour vous-mêmes.

Il arrive souvent, qu’inspiré par l’écrit de quelqu’un d’autre, qu’on se dise « c’est du génie », « c’est trop bien ! », « c’est exactement ce que je veux faire ! ». Et là… il arrive aussi souvent qu’on arrive à un point où ce style, ces inspirations ne nous conviennent plus. Ou alors qu’ils ne nous ont jamais convenus et qu’on a quand même fait avec. Comme avec tout, lorsqu’on force trop, lorsqu’on pousse son corps et son esprit à bout pendant trop longtemps, ils nous disent « stop ».

Et une pause s’impose. Cinq, dix minutes, une à deux semaines, un mois, six mois, un an… Si vous écrivez ou produisez quelque chose qui ne vous inspire pas, qui vous fait du mal, ou disons-le plus crûment, qui vous emmerde, c’est un signe que vous n’êtes pas en train de vous épanouir. Alors que ça devrait être le cas !

Peut-être que vos inspirations ne sont pas les bonnes. Je veux dire par là que ce ne sont pas celles dont vous avez besoin ou qui vous rendent heureux dans l’acte d’écrire. Dans ce cas-là, il est temps de trouver de nouvelles inspirations. Il est temps de refaire votre environnement littéraire et artistique à votre image. De faire le tri dans ce qui vous entoure, et de ne garder que ce qui vous correspond ou de trouver de nouvelles choses qui vous correspondent mieux.

Une fois que vous êtes arrivés là, la dernière étape, c’est d’expérimenter. Si ça ne marche pas, alors peut-être qu’il faut se reposer les bonnes questions. Peut-être que nous n’avons pas encore trouvé.

Mettre ses tripes dans un écrit au final, c’est écrire comme on aime, de façon passionnée, et derrière d’en être fier et de pouvoir en parler pendant des heures sans aucune honte. Il n’y a pas trente-six moyens de le faire. 

Dans le cas d’Ombre et Sang, que je n’ai pas relu ni recorrigé ni quoi que ce soit, que je me suis contenté d’abandonner dans un coin de mon disque dur pendant des mois, c’était simple. Je ne m’inspirais pas des bonnes lectures. Je voulais un roman sombre, il n’était pas même pas deux minutes ce que l’on pouvait caractériser de sombre. Quelques scènes violentes, quelques allusions et c’était plié. Pour moi, ce n’étaient que des paillettes pour se donner un genre.

Alors j’ai pris tout ce que j’avais, j’ai tout reposé à plat, et j’ai tout retravaillé. J’ai commencé par lire des romans plus matures, qui me convenaient mieux. Et j’ai ajouté plus de profondeur aux éléments que je dispersais au gré du vent. J’ai commencé à écouter de la musique qui me marquait, plus que de la musique que j’aimais. Je me suis mis à vraiment me mettre dans la peau de mes personnages. C’est aussi à ce moment que ma vie est devenue assez sombre, douloureuse, et chaotique. Alors tout a fini par me servir. J’ai pris les bases que j’avais évoquées, et me suis entouré de ce dont j’avais besoin.

Très sincèrement, je suis fier de ce que je suis parvenu à construire. Ça a été un combat de longue haleine, qui n’a pas été toujours aussi noir que je le pense. J’ai rencontré tout au long de ce parcours des personnes formidables. J’ai pu échanger avec eux et nous avons pu nous inspirer mutuellement. Dans le lot, j’ai aussi rayé de ma vie des personnes qui ne faisaient que m’aspirer plus d’énergie. J’ai appris à m’imposer, et à savoir ce que je voulais. Mais au final, j’ai trouvé mon compte. Lames et Sanglots était né.

 

Un jour ou l’autre, il arrivera que ce que vous écrirez vous conviendra. Même mieux, que vous obtiendrez du plaisir à écrire un contenu de qualité. Alors ce jour-là, vous aurez gagné. Et je vous souhaite le plus grand bonheur possible.

 

 

Vous pouvez y arriver. Car vous seul·e·s vous connaissez mieux que quiconque. 

 

J’espère pouvoir entendre de vous d’ici là. 🙂

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— Le Traqueur